Page:Flaubert - Par les champs et par les grèves.djvu/315

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de colonnes à chapiteaux ornés de trèfles et supportant une voûte sur laquelle filent des nervures saillantes. À deux cents pieds au-dessus du niveau de la mer, le cloître est bâti sur cette salle des Chevaliers. Il se compose d’une galerie quadrangulaire formée par une triple rangée de colonnettes en granit, en tuf, en marbre granitelle ou en stuc fait avec des coquillages broyés. L’acanthe, le chardon, le lierre et le chêne s’enroulent à leurs chapiteaux ; entre chaque ogive bonnet d’évêque une rosace en trèfle se découpe dans la lumière ; on en a fait le préau des prisonniers.

La casquette du garde-chiourme passe le long de ces murs où l’on voyait rêver jadis le crâne tonsuré des vieux bénédictins travailleurs, et le sabot du détenu bruit sur ces dalles que frôlaient les robes des moines soulevées par les grosses sandales de cuir qui se ployaient sous leurs pieds nus.

L’église a un chœur gothique et une nef romane, les deux architectures étant là comme pour lutter de grandeur et d’élégance. Dans le chœur l’ogive des fenêtres est haute, pointue, élancée comme une aspiration d’amour ; dans la nef, les arcades l’une sur l’autre ouvrent rondement leurs demi-cercles superposés, et sur la muraille montent des colonnes rondes qui grimpent droites comme des troncs de palmier. Elles appuient leurs pieds sur des piliers carrés, couronnent leurs chapiteaux de feuilles d’acanthe, et continuent au delà par de puissantes nervures qui se courbent sous la voûte, s’y croisent et la soutiennent.