Page:Flaubert - Théâtre éd. Conard.djvu/280

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Paul, mettant la redingote.
À part.

Elle est stupide, quoique charmante !

Haut.

Sans doute, cette vie-là possède des avantages. Mais ne croyez-vous pas, vous dont la voix est pure comme un chant d’oiseau et le regard cordial comme une bonne poignée de main, ne sentez-vous pas, dites, qu’il peut se rencontrer parfois des unions plus complètes, une félicité d’une telle ardeur qu’elle envoie ses rayons autour d’elle ? L’enchantement qu’on a l’un de l’autre fait, au milieu des fanges de la terre, comme une poésie permanente : plus on s’aime, plus on devient bon ; l’habitude seule de la tendresse conduit à l’intelligence de tout ; et ce qui paraît de la vertu n’est que l’excès du bonheur !

Jeanne.

Ah ! je vous comprends ! Oui ! oui !

Le Roi des gnomes.

Mais tu te perds, malheureuse !

Jeanne, oppressée.

En effet, assurément ! et, sans bannir un certain idéal, il y a moyen de s’organiser une petite existence bien tranquille. Pourquoi perdre le meilleur de soi-même en sympathies, en émotions, en démarches, au lieu de réserver tout cela pour son propre individu ?

Le Roi des gnomes.

Brabo !

Jeanne.

Comme les autres sont les plus forts, soumettons-nous, afin qu’ils nous respectent et qu’ils nous servent !