Page:Flaubert - Théâtre éd. Conard.djvu/304

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Avez-vous entendu ?

Ils se percent de leurs poignards et tombent morts.
Aux deux autres.

Emportez cela !

Les deux nègres survivants emportent les deux cadavres.
À Paul.

Doutes-tu encore de ma puissance ?

Dominique, à genoux, les mains jointes.

Non ! non ! Moi, d’ailleurs, je n’ai rien dit !

Jeanne.

Penses-tu qu’avec un peuple pareil je manque de moyens pour te contraindre ? J’ai ma tour de fer, bâtie sur un roc d’airain, dans un lac de soufre ; et au-dessus d’elle, pour empêcher de fuir par les airs, il y a continuellement quatre griffons tenant des nuages dans leur gueule et qui tourbillonnent en regardant sous eux. J’ai au fond d’un puits de marbre, après des centaines d’escaliers, un cachot plus étroit qu’un cercueil, dont les pierres vous dévorent, et où les captifs ne peuvent pas mourir ! Mais je te ferais, s’il me plaisait, écraser sous mes chariots, brûler dans mes fours à porcelaine, dévorer par mes tigres, ou boire d’un tel poison qu’immédiatement tu disparaîtrais et qu’il ne resterait de toi sur la terre, pas plus que d’une goutte d’eau évaporée ! Eh bien… va-t’en !… tu es libre.

Paul, croisant les bras.

De quelle façon ?

Jeanne.

Tu peux sortir de mon royaume.

Paul fait un geste de doute.

Oui, sans que personne t’en empêche.