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Qui, dans ce sol nouveau par son bras assaini,
Mit le grain de froment, trésor du ciel béni,
Héritage sans prix dont la France féconde
Dans sa maternité dota le nouveau monde.
Ils vont dans la vallée où les vents assoupis
Font ondoyer à peine un flot mouvant d’épis
Qu’ont mûris de l’été les tépides haleines.

Bientôt le blé jauni tombe à faucilles pleines ;
La javelle, où bruit un essaim de grillons,
S’entasse en rangs pressés au revers des sillons,
Dont le creux disparaît sous l’épaisse jonchée ;
Chaque travailleur s’ouvre une large tranchée ;
Et, sous l’effort commun, le sol transfiguré
Laisse tomber les plis de son manteau doré.

Le soir arrive enfin, mais les gerbes sont prêtes :
On en charge à pleins bords les rustiques charrettes
Dont l’essieu va ployant sous le noble fardeau ;
Puis, presque recueilli, le front ruisselant d’eau,