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Mais Jeanne Hachette est là ! L’héroïne si chère
À la France, chez nous c’est « Jeanne » de Verchère !
Elle n’a pas seize ans. Voyant de toutes parts
L’ennemi la cerner, elle monte aux remparts.
Chaque porte est bien close, et les armes rangées
Dans chaque bastion sont là toutes chargées.
Elle prend un mousquet, met en joue et fait feu.…
Un homme tombe, un autre encore, et peu à peu
Les sanglants agresseurs, pris d’une rage folle,
Sous le canon qui tonne et la balle qui vole,
Interdits, et croyant voir leurs rangs décimés
Par une garnison de soldats bien armés,
Laissent morts et mourants, et battent en retraite ![1]

Hélas ! en feuilletant ces pages, l’on s’arrête
À des drames beaucoup plus froids et plus navrants.
D’où viennent ces clameurs et ces cris déchirants ?
C’est un bourg tout entier surpris dans la nuit noire
Par quinze cents bandits, et — lamentable histoire ! —
Aux horreurs d’un massacre incroyable livré.
Par la haine et le sang le regard enfiévré,
De tous côtés la horde infernale se rue.

  1. Mlle de Verchères, l’héroïne de cet épisode, naquit en 1678. Elle s’appelait Madeleine ; on comprendra que c’est par rapprochement que l’auteur lui donne un autre prénom. Ce fut en 1692 qu’elle accomplit cet exploit. Plus tard, elle épousa Pierre-Thomas Tarieu de Lanaudière, seigneur de Sainte-Anne-de-la-Pérade.