Page:Furetière - Le Roman bourgeois.djvu/182

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en quelque sorte, pour les peines qu’il lui avoit données à l’occasion des messages de Jupiter à ses maistresses. Dès qu’il se porta bien, la deesse le ramena en sa maison, où depuis elle l’a retenu un peu de court, et a veillé plus exactement sur sa conduite. Il est vray qu’il a esté beaucoup plus sage qu’auparavant, et que pour le corriger il ne luy a plus fallu monstrer des verges, mais le menacer de Mercure ; c’est ce qui a eu plus de pouvoir sur luy que toutes les remonstrances que ceux qui avoient entrepris de le corriger luy auroient peû faire. Il a depuis tousjours hay au dernier point toutes les affections mercenaires ; il a juré hautement, par son bandeau et par sa trousse, qu’il n’en seroit jamais l’entremetteur, et que, bien loin d’y fournir ses flesches, il en retireroit entierement ses faveurs si-tost qu’on y mesleroit de l’argent et des presens. C’est aux seuls amans tendres et passionnez qu’il a reservé son secours, et à ces ames nobles et espurées qui aiment seulement la beauté, l’esprit et la vertu, toutes trois originaires du ciel. Tous les autres qui ont des desirs brutaux et interessez, il les abandonne à leurs remords et à leurs supplices ; il les desadvoue et ne les veut plus reconnoistre pour les sujets de son empire.