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ISOLINE

dans leur masse impénétrable. On ne voit qu’une vieille muraille percée d’une porte voûtée, ayant d’un côté une tour carrée coiffée d’un toit moderne en ardoises et de l’autre une petite chapelle gothique. Le bâtiment d’habitation, en retour de la chapelle, ne présente à la vallée que sa face la plus étroite.

L’horizon est fermé de toutes parts par la haute végétation ; les prés inondés, couverts d’herbe épaisse où luisaient çà et là des flaques d’eau, font de beaux plis amples entre les bouquets de bois.

Gilbert s’avança pour tâcher de découvrir quelque chose de plus ; il descendit la route, traversa un carrefour où se croisaient plusieurs chemins, sorte de pont qui comble la vallée et la traverse. Il vit alors au delà d’un étang, derrière un fouillis de branches nues, la longue façade grise, percée de fenêtres à carreaux étroits, du château proprement dit. Il s’arrêta et eut le cœur serré devant la mélancolie implacable qui émanait du paysage ; l’étang débordé noyait ses rives et semblait prêt à se verser dans le vallon. Une brume épaisse fumait lente et bleuâtre, et le morne château, qu’elle enveloppait, semblait porté sur un nuage ; les