Page:Gautier - La sœur du soleil.djvu/274

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— Et Loo ! s’écria tout à coup Raïden, où est-il ?

— C’est vrai, dit le prince, lui seul n’est pas revenu.

— Il était pourtant parti le premier, dit Raïden. On attendit quelques instants.

— Par malheur, dit le prince, le devoir qui m’appelle ne souffre pas de retard, il nous faut partir ; c’est avec douleur que j’abandonne cet enfant dévoué.

Abandonner Loo ! la joie de tous, celui qui rappelait aux pères leurs enfants, ce petit héros moqueur, un peu cruel, qui ne craignait rien et riait de tout ! On se mit en route, le cœur serré tous soupiraient.

— Qu’a-t-il pu lui arriver ? il s’est peut-être perdu dans l’obscurité, disait Raïden en se retournant fréquemment.

On marchait depuis dix minutes, lorsque ceux qui étaient en arrière crurent entendre un galop précipité. Ils s’arrêtèrent et écoutèrent. Un cheval arrivait en effet ; au bruit des pas se mêlèrent bientôt des éclats de rire : c’était Loo.

— Raïden criait-il, viens me prendre, je vais tomber, je n’en puis plus, j’ai trop ri !

Raïden se hâta d’aller au-devant de l’enfant.

— Eh bien te voilà ? lui dit-il pourquoi es-tu resté en arrière ? Tu nous a effrayés.

— C’est que j’avais beaucoup de choses à faire, dit Loo ; vous avez eu fini avant moi.

— Qu’as-tu fait ?

— Prends-moi cela, d’abord, dit Loo en tendant à Raïden la tête coupée ; elle est lourde comme si elle était en pierre.

— Comment ! tu as réussi à la dérober ?

— Oui, dit Loo qui, à chaque moment, regardait derrière lui, et ils croient là-bas qu’elle est partie toute seule, de sorte qu’ils sont tous fous en ce moment.