Page:Gautier - La sœur du soleil.djvu/28

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inquiétés d’aucune manière. Mon père, je le déplore, a cru devoir poursuivre de sa colère et exterminer ces malheureux mais, je le jure, moi vivant, il ne sera pas versé une seule goutte de leur sang.

Hiéyas fut stupéfait de l’accent résolu du jeune siogoun. Pour la première fois il avait parlé en maître et ordonné. Il s’inclina, en signe de soumission, et n’objecta rien. Fidé-Yori avait atteint sa majorité, et s’il n’était pas encore proclamé siogoun, c’était parce que Hiéyas ne se hâtait guère de déposer les pouvoirs. Celui-ci ne voulut donc pas entrer en lutte ouverte avec son pupille ; il abandonna momentanément la question et passa à autre chose.

— On m’annonce, dit-il, qu’un seigneur a été attaqué et blessé cette nuit, sur la route de Kioto. J’ignore encore le nom de ce seigneur ; mais le prince de Nagato, qui était à Kioto cette nuit, a peut-être entendu parler de cette aventure ?

— Ah ! tu sais que j’étais à Kioto, murmura le prince ; je comprends alors pourquoi il y avait des assassins sur ma route.

— Comment Nagato pouvait-il être en même temps à Osaka et à Kioto ? dit le prince de Sataké il n’est bruit ce matin, que de la fête sur l’eau qu’il y a donnée cette nuit et qui s’est si joyeusement terminée par une bataille entre les seigneurs et les matelots des rivages.

— J’ai même attrapé une égratignure dans la mêlée, dit Nagato en souriant.

— Le prince franchit en quelques heures les routes que d’autres mettraient une journée à parcourir, dit Hiéyas, voilà tout. Seulement, il ménage peu ses chevaux : chaque fois qu’il rentre au palais, sa monture s’abat et expire.