Page:Gautier - La sœur du soleil.djvu/58

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Les dames d’honneur chuchotent entre elles et leur voix se confond avec le léger frisson de leurs robes, dont elles disposent les plis abondants. Assises à droite et à gauche de l’estrade royale, ces princesses forment des groupes ; chaque groupe a son grade hiérarchique et ses couleurs spéciales. Dans l’un les femmes sont vêtues de robes bleu clair, ramage d’argent, dans un autre de robes vertes, lilas ou jaune pâle.

Au sommet de l’estrade, couverte de moelleux tapis, la Kisaki resplendit au milieu des flots de satin, de gaze, de brocart d’argent qui forment ses amples robes rouges ou blanches, parmi lesquelles ruissellent des pierreries. Les trois lames verticales qui surmontent son diadème semblent, au dessus de son front, trois rayons d’or.

Quelques princesses ont gravi les degrés du trône, et, agenouillées sur la plus haute marche, s’entretiennent gaiement avec la souveraine ; celle-ci laisse échapper quelquefois un rire léger qui va scandaliser quelque vieux prince silencieux, fidèle gardien des règles de l’étiquette. Mais la souveraine est si jeune, elle n’a pas vingt ans, qu’on lui pardonne aisément de ne pas toujours sentir sur son front le poids de la couronne, et à son rire la joie éclate de toutes parts comme les chants des oiseaux aux premiers rayons du soleil.

— Les dieux supérieurs soient loués ! dit à demi voix une princesse à ses compagnes, le souci qui attristait notre souveraine s’est enfin dissipé : elle est plus joyeuse ce soir que jamais.

— Est-elle d’humeur clémente ! dit une autre. Voici Fatkoura rentrée en grâce. Elle gravit les degrés du trône. La Kisaki l’a fait appeler.