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le second rang du collier

on y avait mis un tapis par crainte de l’humidité. Le cerisier était en fleur, et de jeunes pierrots, que nous avions élevés, pépiaient dans les branches en battant des ailes, sautant de l’arbre à nos épaules.

Marianne parut en haut de l’escalier et descendit entre le double rang des pots à fleurs, une carte de visite à la main.

— « Victor de Madarasz ! » lut mon père… Qui cela peut-il être ?… Est-ce que tu as déjà vu ce monsieur ?

— Non, monsieur, il n’est jamais venu.

— Quel air a-t-il ?

— Il est joliment bien habillé, et pas comme tout le monde.

— Jeune ou vieux ?

— Oh ! tout jeune !

— Alors, qu’il vienne ici… Montre-lui la route.

Peu d’instants après, la silhouette, très singulière et infiniment gracieuse, d’un jeune homme, se profila sur le fond clair de la cour, et, avec un peu d’hésitation, gêné par les trois paires d’yeux braqués sur lui d’en bas, le nouveau venu commença à descendre.

Mon père plissait ses paupières, pour mieux voir, n’osant tout de même pas mettre son monocle. Nous ressentions ce que devait éprouver cet inconnu et l’effort qu’il lui fallait faire pour avoir bonne contenance, ne pas trébucher et piquer du