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le second rang du collier

soupe, assez épaisse pour que la cuiller pût s’y tenir debout.

Après le dîner, il s’endormait, en lisant un journal ou un livre, et nous trouvions cela mauvais. Pour le tenir éveillé, il fallait une occupation bête et ne fatiguant pas l’attention : le jeu de dominos était tout indiqué.

Théophile Gautier, résigné, se soumit : agenouillé dans un fauteuil, il étalait tous ses dominos sur la paume de sa main gauche, « pour qu’on ne vît pas son jeu », et, sans lorgnon, les regardait, de très près, en fermant un œil.

Rodolfo nous avait initiées, ma sœur et moi, aux finesses du domino à quatre, ou avec un mort, comme au whist ; nous essayâmes de faire comprendre au père les ingénieuses combinaisons, qui, seules, rendent le jeu intéressant ; mais il n’y eut pas moyen : il posait très exactement, chiffre contre chiffre, sans s’inquiéter du jeu de son partenaire, et toujours, avec un naïf empressement, se débarrassait de son double six.



Notre ménagerie était devenue assez nombreuse. Nous nous étions cependant débarrassés des volailles que, sous aucun prétexte, nous ne voulions tuer ni manger, et dont le nombre devenait inquiétant : les poules parvenaient souvent à s’échapper