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le second rang du collier


Du Grand-Montrouge à Neuilly, c’était loin vraiment : il fallait des heures pour faire le voyage, par tout un jeu d’omnibus qui coïncidaient vaguement. Aussi les tantes, Lili et Zoé, qui demeuraient au Grand-Montrouge, ne pouvaient-elles accomplir l’aller et le retour dans la même journée, sans affronter, surtout en hiver, la nuit noire et dangereuse. L’une ou l’autre devait venir chaque mardi cependant, pour toucher la pension que leur frère leur servait. Celle qui venait couchait à Neuilly, pour repartir le lendemain, quelquefois le surlendemain. Mais l’autre s’ennuyait, seule à Montronge. Après bien des tâtonnements, on s’arrêta à cette combinaison : à tour de rôle, Lili ou Zoé venait seule ; le surlendemain, sa sœur la rejoignait à Neuilly, et, le quatrième jour, elles retournaient ensemble à Montrouge. De cette façon, leur vie était un peu animée, plus gaie, moins solitaire, et ce séjour avait l’avantage de leur valoir une très sérieuse économie.

Le point délicat, c’était les relations entre les tantes et ma mère, qui n’avaient jamais été extrêmement cordiales : cette vie sous le même toit mettait à de périlleuses épreuves les caractères difficiles. Mon père avait dû parlementer longtemps et employer toute son éloquence pour obtenir, de part