Page:Gautier - Le Vieux de la montagne, Armand Colin et Cie, 1893.djvu/137

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— Ah ! mon père, s’écria-t-elle, qu-est-il arrivé ? Qui a poussé ce cri ? Il m’a semblé que c’était vous !

— Chère fille ! J’aurais pu t’embrasser hier pour la dernière fois.

— Ce poignard ! Vous êtes blessé ?

— Non, grâce à Dieu ! Ou plutôt parce que mon ennemi m’a fait grâce. Voyez, messires : malgré votre vigilance, au milieu du camp, gardé par mes meilleurs chevaliers veillant dans ma tente même, ce poignard vient d’être planté, au chevet de ma couche et d’y clouer ce papier !

Sybille prit le papier et lut à la clarté des torches :

« Celui qui a enfoncé là ce poignard pouvait aussi aisément le plonger dans ton cœur. »

— Je me suis éveillé en sursaut et j’ai vu briller cette lame tout près de ma tempe, dit Amaury ; l’angoisse et la surprise m’ont arraché ce cri.

Sybille faisait remarquer que le poignard était empoisonné jusqu’à mi-lame et que des mots étaient gravés. Homphroy lut en arabe : « Le Khâlîfe de Dieu. »

— C’est ainsi que l’impudent signe ses crimes, dit-il.