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histoire du mouvement janséniste

gros pamphlet est si parfaitement inconnu, bien qu’il en soit question dans la XVe Provinciale, qu’on a par deux fois, en 1753 et de nos jours, publié comme inédits les prétendus Monita secreta des jansénistes qui se lisent à la page 381 du livre de Marandé.

Au commencement de janvier 1654, le docteur Hallier, un ancien janséniste qui se disait rentré dans le giron de l’Église, fit un suprême effort pour ruiner ses anciens amis dans l’esprit des puissances. Il dit publiquement à la reine, en présence de Mazarin, que les jansénistes avaient des communications toutes particulières avec le cardinal de Retz fugitif, avec le prince de Condé rebelle, avec les Espagnols et avec Cromwell ; c’était les accuser de haute trahison. La reine et le cardinal prêtaient l’oreille à ces accusations atroces ; il n’y avait pas alors de lois contre les diffamateurs et c’était le temps où un plaisant pouvait dire : « Si l’on m’accusait d’avoir volé les tours Notre-Dame, je commencerais par me mettre en sûreté. » Arnauld d’Andilly, un des solitaires incriminés, prit en mains la cause de ses amis, et il écrivit à Mazarin une grande lettre qui ne changea rien à la situation. Les calomniateurs soutinrent hardiment ce qu’ils avaient avancé, et chaque jour ils imputaient à leurs ennemis de nouveaux crimes ; il faudrait transcrire des chapitres entiers des Mémoires d’Hermant pour en dresser la liste. Ils avaient traité Singlin de voleur à propos des restitutions de Chavigny mourant ; dans l’affaire des grandes aumônes de Champagne, il fallut prouver par l’examen des registres de saint Vincent de Paul que les sommes versées par M. de Bernières et par les amis de Port-Royal lui avaient bien été remises et n’avaient pas servi à fomenter la guerre civile. On ne saurait croire à quels excès se portèrent