Page:Gazier - Histoire générale du mouvement janséniste, depuis ses origines jusqu’à nos jours, tome 1.djvu/119

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
107
chapitre vi

historiens de Port-Royal n’ont pas mis en lumière ; il mérite pourtant d’être signalé, car c’est un beau spectacle que celui d’un homme de génie renonçant spontanément à la gloire, et cela par principe de religion. Les raisons qui ont amené Pascal à ne pas continuer les Provinciales sont nombreuses, et toutes lui font honneur. Il sut que Singlin et la Mère Angélique désapprouvaient cette façon de prendre en main la cause de la vérité et de la vertu. Aux yeux d’Angélique, le silence « eût été plus beau et plus agréable à Dieu, qui s’apaise mieux par les larmes et par la pénitence que par l’éloquence, qui amuse plus de personnes qu’elle n’en convertit ». Il fallait assurément combattre les Jésuites, mais comment ? par la « charité » et non par « l’autorité, » et la Mère Angélique ajoutait : « Nous devrions changer tous nos efforts dans la prière et dans la compassion…. » En outre, Pascal voyait les curés de Paris assemblés en synode, les prédicateurs les plus renommés, comme le P. Senault, et enfin les évêques de l’Assemblée générale du clergé de France déclarer la guerre à la morale corrompue des casuistes, et il se disait que dans ces conditions un simple laïc doit laisser la parole à l’autorité compétente. Il venait d’être profondément remué par la guérison soudaine et radicale de sa nièce, pensionnaire à Port-Royal. Le miracle de la Sainte Épine lui prouvait que Dieu même prenait parti pour ses amis dans cette querelle, et quand Dieu parle si haut, l’homme n’a plus qu’à se taire. Ce n’est pas tout encore : Pascal apprit alors que des personnes très influentes plaidaient auprès de la reine régente et de Mazarin la cause des prétendus jansénistes ; on avait l’espoir de négocier la paix religieuse, et si les Provinciales étaient continuées, on ne ferait qu’exaspérer de