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chapitre vi

logique fait peine à lire, car il y avait bel et bien une plaie hideuse et qui faisait horreur, et Marguerite Périer, qui vécut plus de quatre-vingts ans, ne portait pas la moindre cicatrice ; son portrait conservé à Linas la représente comme une enfant tout à fait charmante. Sainte-Beuve supprime de propos délibéré certains détails gênants comme le double témoignage de Félix, premier chirurgien du roi ; il chicane sur tout, et sa rectification au sujet du cachet de Pascal est de toute fausseté. Ce cachet a été conservé ; il était à l’archevêché de Reims avant la guerre de 1914 et ce n’est pas un œil que l’on y voit, comme dans les armes parlantes de l’écu des Périer, c’est bien un ciel resplendissant, avec une fort belle étoile.

Puisque l’auteur de Port-Royal est contraint d’avouer que de grands esprits et même des hommes de génie, même l’évêque de Tournai, Choiseul-Praslin, même le pape Benoît XIII, ont cru fermement à la réalité du miracle, il n’est pas bien venu à dire qu’il y voit, lui, l’humiliation de l’esprit humain, et il n’avait pas besoin d’ajouter : « Chose singulière et assez pénible à dire, si le Pascal des Provinciales passa sans plus tarder au Pascal des Pensées, ce fut à l’occasion de cette affaire qui nous répugne si fort aujourd’hui[1]. » On savait de reste que Sainte-Beuve ne croyait pas à la possibilité d’un miracle, il aurait pu le dire plus simplement sans insinuer que Pascal et Racine et bien d’autres étaient d’une crédulité un peu niaise. Les admirateurs de Port-Royal ont peine à lui pardonner cette incartade et quelques autres du même genre.

  1. Le Rabat-joie du Père Annat est aux yeux de Racine un ouvrage ridicule et extravagant, Sainte-Beuve le juge « un élégant écrit ».