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histoire du mouvement janséniste

premier président n’avait pas collaboré à la thèse de son fils. Guillaume de Lamoignon eut besoin, dit Hermant, « de tout l’esprit et l’éloquence qui venaient ordinairement à son secours dans les affaires les plus difficiles[1] ». À vrai dire il n’en sortit pas à son honneur, et les docteurs de Sorbonne Fortin et Flavigny lui firent entendre à ce sujet des vérités bien dures.

Ce qui empêchait beaucoup de magistrats de témoigner leurs véritables sentiments arrêtait à plus forte raison les ecclésiastiques, et l’on fit alors une complainte au sujet d’un prébendier qui se résignait à signer le Formulaire en disant tristement :

Je veux conserver ma prébende.
Contre Jansénius, j’ai la plume à la main ;
Je suis prêt à signer tout ce qu’on me demande,
Qu’il soit ce qu’on voudra, calviniste ou romain.

La plupart des évêques eurent alors, suivant l’expression de Jacqueline Pascal « des courages de filles, » et il faut ranger parmi eux les mieux intentionnés, tels que l’archevêque de Sens, Henri de Gondrin, Alphonse d’Elbène, évêque d’Orléans, Anne de Lévis de Ventadour, archevêque de Bourges, Gilbert de Choiseul, évêque de Comminges, l’évêque de Vence, Antoine Godeau, Félix Vialart de Châlons et beaucoup d’autres. On sait qu’il n’y eut de refus de signer purement et simplement que chez les quatre prélats dont Besoigne a écrit les vies pour faire suite à son histoire de Port-Royal : les évêques de Beauvais, d’Angers, d’Aleth et de Pamiers, Choart de Buzanval, Henri Arnauld, Pavillon et Caulet. À l’exception de ces quatre, dont le

  1. Mémoires d’Hermant, t. VI, p. 391. Ce fut une grosse affaire au sujet de laquelle Hermant entre dans de grands détails très intéressants. — Racine dit sèchement que Lamoignon empêcha la censure et imposa silence à la Faculté.