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histoire du mouvement janséniste

Lemaître de Saci ; elle mourut à quarante-sept ans, le 30 novembre 1689, « dans une paix merveilleuse, et une entière confiance en la miséricorde de Dieu ».

La Sœur Eustoquie de Brégy, filleule d’Anne d’Autriche, dont le rôle a été si important en 1664, ne figure même pas dans le grand Nécrologe de dom Rivet (1723), ni dans le petit Nécrologe de René Cerveau (1761). Elle est morte à cinquante et un ans, en 1684, et ce que l’on sait d’elle durant ses quinze dernières années se réduit à ceci : elle a été chantre du monastère, sans doute à cause de sa belle voix et de sa parfaite connaissance du plain-chant. Besoigne s’étonne qu’une fille douée de si rares talents ne paraisse plus dans l’histoire de la maison ; il explique la chose en disant « Son panégyriste, que j’ai copié, dit que son humilité la porta à demander en grâce qu’on la laissât vivre inconnue, comme pour se purifier de ce qu’elle avait pu contracter d’imperfection pour avoir été trop connue[1]. » La noble femme dont sa propre mère disait en 1665 : « J’ai une fille qui ne relève que de Dieu et de son épée », s’est dérobée systématiquement aux honneurs ; ne retrouve-t-on pas là les traditions de Saint-Cyran et de la Mère Angélique ? Toutes les « auxiliaires » qui s’étaient signalées dans la lutte ont suivi cet exemple parce que toutes, sans exception, étaient animées des mêmes sentiments.

La maison des Granges vit reparaître peu à peu ceux qui l’avaient habitée jadis mais Robert Arnauld d’Andilly ne se pressa pas d’y revenir. Admirablement accueilli à Versailles, le 10 septembre 1671, il ne rentra aux Granges qu’au mois de mai 1673, à l’âge de quatre-vingt-quatre ans. La situation délicate de son fils,

  1. Besoigne, tome III, p. 120.