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chapitre xiii

compte de la Bibliothèque janséniste des jésuites Colonia et Patouillet, le Bonheur de la mort chrétienne et les Élévations sur la passion, deux ouvrages ascétiques de Quesnel. Il s’est même produit au sujet des Élévations un fait curieux et très instructif ; on les a réimprimées tout récemment à Lyon chez un libraire ultra-catholique[1], et on les a données comme étant l’ouvrage d’un saint prêtre de l’Oratoire, « formé à la piété par le cardinal de Bérulle lui-même ». Or ce saint prêtre c’est Pasquier Quesnel en personne ; ignorance ou finasserie, le fait n’en est pas moins digne de remarque, et le livre est bien édifiant.

Pour revenir à la Bulle, l’effet qu’elle produisit en 1713 ne saurait être comparé à celui qu’avaient produit les Bulles antérieures. Celles-là ne s’adressaient guère qu’à des initiés, à des gens d’Église, et le commun des fidèles ne s’y intéressait pas beaucoup. La Bulle de Clément XI eut au contraire un très grand retentissement, car il s’agissait d’un livre qui avait obtenu durant quarante ans un prodigieux succès, et dont les innombrables exemplaires étaient entre les mains de tout le monde[2]. Les propositions condamnées n’étaient pas toutes relatives à des questions abstruses, et le bon sens populaire pouvait se faire une opinion sur la signification de la plupart d’entre elles. Il n’était pas besoin d’être grand clerc

  1. Lyon, imprimerie Mougin, Rusand, 1889, un vol. in-24 de 334 pages.
  2. « Il est peu de personnes qui par les soins affectés des gens du parti, qui s’attache de plus en plus à le distribuer, qui ne l’ait chez soi, tant chez les ecclésiastiques que chez les religieux et religieuses que chez les séculiers. Il y est le livre mignon et chéri. » Lettre du P. Timothée au pape, 8 août 1713. — Archives du Vatican. — J’ai sous les yeux l’exemplaire de la fille de Colbert, de la duchesse de Chevreuse, dont le mari n’était nullement janséniste.