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histoire du mouvement janséniste

mais un obstacle insurmontable s’était dressé devant elle : ce malheureux enfant qui devait être le désespoir et la honte de sa vie. Sans le chevalier de Rohan ; Mme  de Guémené serait demeurée jusqu’à la fin, comme il est dit dans le Nécrologe, la particulière amie et la bienfaitrice de Port-Royal. Il est donc juste de chercher à la réhabiliter et de lui décerner à tout le moins le titre de bienfaitrice honoraire.

Mme  de Sablé fut introduite à Port-Royal par la princesse de Guéméné aux environs de 1640, et en même temps que la future reine de Pologne, Marie de Gonzague. Ces trois amies y faisaient parfois des retraites, mais leur austérité n’était pas excessive, car la Mère Angélique était souvent obligée de bannir ce qu’elle appelait leurs diableries, quand une coiffe, un collet, une mode venaient sur le tapis et exposaient ces dames à se gâter les unes les autres. La princesse Marie ne tarda pas à quitter la France pour monter sur le trône, et nous la verrons demeurer une fidèle amie de Port-Royal. La marquise de Sablé persévéra dans la mesure de ses forces ; elle mourut même à Paris, dans l’appartement qu’elle s’était aménagé en 1654 au-dessus du chapitre des religieuses, et qui est occupé aujourd’hui par une salle de malades, mais elle y vécut quatorze ans avec une abbesse intruse qui avait abjuré les sentiments de la Mère Angélique. Elle y reçut au plus fort de la persécution des visites princières et même royales, puisque le duc d’Orléans, venait à l’improviste faire collation chez elle et qu’on lui amena en 1665 le jeune fils de Louis XIV, un enfant de quatre ans, qui fit force gambades dans la tribune donnant sur le chœur. Mme  de Sablé était, on peut le dire, la plus insupportable des bienfaitrices, pleine de cœur, très généreuse et très dévouée, mais très exi-