Page:Genoude - Les Pères de l'Eglise, vol. 1.djvu/234

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

murmure chez des peuples abrutis par le polythéisme. Domitien pouvait bien, en effet, se trouver, sans rougir, entre Jupiter et Mercure.

Adrien, sophiste ridicule, tyran jaloux de son autorité, qui avait fait mourir, au commencement de son règne, quatre sénateurs consulaires, ses ennemis personnels, parce qu’ils avaient paru dignes de la pourpre impériale, fut placé au rang des dieux. On connaît sa passion pour Antinoüs. Il l’avait déifié ; et les médailles, les statues, les temples, les villes, consacrés à Antinoüs, sont la honte d’Adrien. Au reste, comme le remarque un historien qui n’est pas suspect de prévention favorable au Christianisme[1], des quinze premiers Césars, Claude est le seul dont les amours n’aient pas fait rougir la nature.

Antonin, appellé le pieux, adopté par Adrien, avait gouverné l’empire de son cabinet, et adopta Marc-Aurèle.

C’est sous ces princes, appelés philosophes, que le sang chrétien coula à grands flots dans toutes les contrées de l’Asie, dans l’Afrique et surtout dans les Gaules, à Lyon, à Vienne, à Autun, à Dijon, à Tournus, à Châlons, dans la Bresse et jusque sur les bords du Rhin et de l’Escaut.

Antonin voulut empêcher les persécutions contre les Chrétiens ; mais le paganisme, qui se sentait mourir, fit des efforts étonnants pour surmonter les dispositions particulières de l’empereur. Saint Justin, dont la première apologie fut adressée à Antonin, fait de l’état de l’Église à cette époque un tableau qui prouve combien les Chrétiens ont souffert sous ce règne. Cette apologie commence ainsi : « À l’empereur Tite Ælius Antonin, pieux, Auguste ; à son fils très-véridique et philosophe ; à Lucien, philosophe, fils de Lucien par la naissance, et d’Antonin par l’adoption, prince ami des lettres ; à la vénérable assemblée du sénat et au peuple romain tout entier ; au nom de ceux qui, parmi tous les hommes, sont le plus injustement haïs et persécutés ; moi, l’un d’eux, Justin,

  1. Gibbon.