Page:Genoude - Les Pères de l'Eglise, vol. 1.djvu/390

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de force pour démontrer, par le spectacle de tout ce qui existe sous les cieux, la sagesse du Dieu qui a tout créé.

Mais l’oubli de ce Dieu, le seul véritable, s’établit si profondément dans le cœur des hommes, à la faveur de sa patience, qu’ils poussèrent le sacrilége jusqu’à donner son nom à de simples mortels. La contagion du mal passa du petit nombre à la multitude, en qui le préjugé populaire finit par obscurcir entièrement la connaissance des choses stables et éternelles. Les premiers qui établirent un culte et des sacrifices en l’honneur de certains héros interrompirent la tradition du dogme catholique, qui dès lors s’effaça chez leurs descendants.

Pour moi, d’après ce que je viens de dire, en même temps que je ferai parler un cœur qui aime son Dieu, j’userai d’un langage ami des hommes, et je découvrirai à tous ceux qui écoutent la raison le culte immuable seul digne de Dieu qui voit tout ; et ne devrait-il pas se trouver au fond de tous les cœurs, puisque nous jouissons tous des bienfaits de sa Providence ?

Je n’emploierai pas les vains artifices du discours, je tirerai mes preuves et des anciennes poésies qui forment les premières histoires des Grecs, et des ouvrages que vous avez tous entre les mains.

C’est d’après ces monuments que les illustres adorateurs des idoles ont fait de la superstition une loi, qu’ils ont imposée à la multitude ; c’est aux mêmes sources que je puiserai mes témoignages pour les instruire ; c’est l’autorité même de leurs poëtes qui les convaincra de folie.

Et d’abord voici Eschyle qui, dans le prologue d’un de ses poëmes, parle ainsi du seul Dieu véritable :

« Tiens l’homme à une longue distance de Dieu, qu’il ne faut pas se figurer revêtu de chair et semblable à l’homme. Tu ne le connais pas ; il se manifeste partout, dans la force indomptable du feu, dans l’épaisseur des ténèbres, dans l’étendue de la mer. Tu le vois dans l’instinct des animaux ; les pluies, les vents, les nuées, l’éclair, la foudre le révèlent. Tout exécute ses ordres, et la mer, et les rochers, et les sources, et les torrents. Au seul regard de ce maître redoutable, tout