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noms. Pourrions-nous croire que Dieu ait voulu, comme quelques-uns le prétendent, s’offrir à nous sous de pareils traits pour recevoir nos hommages ? Qu’est-il besoin de vous dire, comme si vous ne le saviez pas, quelle forme prend la matière entre les mains de l’ouvrier ; comme elle est par lui taillée, pétrie, moulée, fondue pour devenir un Dieu ? Souvent il prend un vase destiné aux plus vils usages, il en change la forme, lui donne une figure nouvelle qu’il pare d’un nouveau nom, et voilà un Dieu.

À nos yeux, ce n’est pas seulement de la folie, c’est une insulte, c’est un outrage à la Divinité. Quoi ! celui dont le langage de l’homme ne pourrait redire la gloire et la beauté, vous osez l’avilir jusqu’à donner son nom à ce qui périt, à ce qui réclame tous les soins de l’homme et ne peut échapper à la corruption ! Et quels hommes que ceux qui fabriquent et façonnent vos divinités ? Pour tout dire, en un mot, il ne leur manque aucun des vices. Le dirai-je ? souvent ils interrompent leur travail pour se livrer au crime avec les femmes qu’ils emploient. Ô folie ! ô démence inconcevable. Accorder à des mains aussi impures le privilége de faire des dieux, de les placer dans des temples, de les offrir à la vénération publique ! donner pour gardiens à ces dieux des hommes non moins corrompus que ceux qui les fabriquent ! établir des hommes gardiens des dieux ! Ne voyez-vous pas que c’est une impiété, non-seulement de le dire, mais même de le penser ?

X. Nous savons aussi et nous sommes persuadés, convaincus, que le vrai Dieu n’a pas besoin des dons, des offrandes matérielles de l’homme ; qu’il n’aime de nous que ce qui réfléchit l’image de ce qu’il trouve en lui-même ; que la tempérance, la justice, l’humanité sont surtout agréables à ce Dieu qui porte un nom que lui seul s’est donné.

C’est pour l’homme que ce Dieu d’une infinie bonté a tout fait sortir du néant ; et si l’homme sait, par ses œuvres, répondre à tant d’amour et à ses hautes destinées, il méritera de vivre et de régner avec lui, d’être heureux de sa félicité, et affranchi pour toujours de la corruption et de la douleur. Nous n’avions pas la vie, c’est Dieu qui nous l’a donnée ; n’est-il pas