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part des livres de ce temps qui sont lus avec goût, qui donnent du nom et de la vanité à leurs auteurs ! Quel plaisir d’aimer la religion et de la voir crue, soutenue, expliquée par de si beaux génies et par de si solides esprits, surtout lorsqu’on vient à connaître que, pour l’étendue de lumières, pour la profondeur et la pénétration, pour les principes de la pure philosophie, pour leur application et leur développement, pour la justesse des conclusions, pour la dignité du discours, pour la beauté de la morale et des sentiments, il n’y a rien, par exemple, qu’on puisse comparer à saint Augustin, que Platon et que Cicéron ! » C’est ainsi que s’exprime La Bruyère.

On trouve dans les Apologies de saint Justin, d’Athénagore, de Tatien, de saint Clément d’Alexandrie, des traits d’une éloquence admirable.

Tertullien a des pensées obscures et des métaphores outrées ; mais la grandeur de ses sentiments est souvent admirable.

Saint Cyprien a de l’enflure et de la dureté africaine ; cela ne pouvait guère être autrement dans son siècle et dans son pays. Mais on voit partout une grande âme, une âme éloquente qui exprime ses sentiments d’une manière noble et touchante.

Saint Augustin a des pointes et des jeux de mots : c’était encore un défaut qu’on aimait dans son temps et auquel son esprit vif et subtil lui donnait une pente naturelle. Mais à côté de ce défaut, quelle abondance d’idées élevées et de sentiments tendres ! Quel talent pour la persuasion ! Quelle vigueur de raisonnement pour remuer les esprits ! Quelle douceur pour s’insinuer dans les cœurs !

Saint Ambroise a aussi quelques jeux de mots ; mais cet abus de l’esprit est chez lui bien rare. Sa lettre à l’empereur Théodose est pleine d’une force et d’une persuasion inimitables. Que de regrets tendres et éloquents, quel épanchement d’une pieuse douleur, quand il parle de la mort de son frère ! comme les larmes coulent de ses yeux, et comme il en fait répandre !