Page:Germain - Œuvres philosophiques, 1896.djvu/26

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des points de mire pour les bombes, enfin faisant par réflexion tout le mal que je peux à qui jamais ne m’en fit aucun, que je ne connais pas ; mais c’est le métier. On m’accable à mon tour de boulets, d’obus et de bombes, et tout va le mieux du monde ». L’immortel auteur de la Tactique[1] eût signé de telles paroles ; mais ne sont-elles pas singulièrement signifiantes sous la plume d’un militaire, alors même que la manie sanguinaire des conquêtes troublait tant de cerveaux ?

De nos jours, pour descendre dans l’arène où se discutent, se forment et s’agitent les opinions, il suffit d’en trouver l’occasion — et l’occasion est aveugle. À l’époque de Sophie Germain, on respectait assez les autres et soi-même, on plaçait la portée et la valeur de l’œuvre assez au-dessus des impatiences personnelles, pour ne saisir le public de ses travaux qu’après s’être laborieusement préparé ; aussi, à l’âge de trente ans, n’avait-elle encore rien publié. Quelle fut sa surprise quand, un jour, on lui remit des vers grecs composés en son honneur ! Un helléniste distingué, d’Ansse de Villoison, s’était fait l’écho de l’ad-

  1. Poème de Voltaire.