Page:Gevrey - Essai sur les Comores, 1870.djvu/140

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l’arrivée des bœufs d’Achmed qu’on était allé chercher au pâturage ; pendant ce temps, Achmed nous conduisit à son cabinet de travail, petite cabane en cocotier assise sur un rocher dominant le mur d’enceinte, vers le centre du bassin. Deux kibanis, trois tabourets en vois et un coquillage accroché au mur en guise de lampe, formaient l’ameublement de cette pièce ; plusieurs petits judas, ménagés dans les murs, permettaient au sultan de surveiller son peuple et, surtout, la douane, la rade et un chantier où il faisait construire un boutre. Sur les solives qui figuraient le plafond, étaient posés une vingtaine de vieux fusils à pierre, la plupart sans baguettes, sans chiens ou sans batteries, et complètement hors d’usage. Achmed pria M. Pompon de charger d’une lettre pour le sultan d’Anjouan. Il s’orna d’une énorme paire de bésicles, on lui apporta un encrier carré en cuivre, un roseau taillé, un cahier de papier écolier, et il écrivit sa lettre sur ses genoux très prestement et en pur arabe, qui est resté la langue cérémonieuse des princes dans les Comores. Quand il eut fini, nous allâmes acheter quelques nattes et nous promener dans la ville et les environs. Outre les maisons en pierres, le mur d’enceinte renferme une quantité de cases en cocotier ou grouille une nombreuse population qui se reporte partout sur le passage des étrangers, si bien qu’on est tenté d’en exagérer le nombre ; elle m’a paru être d’au moins trois mille habitants. On rencontre très peu de femmes arabes, les rares femmes qu’on aperçoit ont la tête voilée et se cachent la figure, je ne parle pas des femmes esclaves