Page:Gevrey - Essai sur les Comores, 1870.djvu/142

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jarret d’un seul coup du couteau à manches de corne que tous les Comoriens portent à leur ceinture, dans un étui de bois ; un second coup lui ouvrit la gorge et, en un clin d’œil, il fut renversé et sa tête séparée du tronc. Le coup du jarret avait été porté avec une telle dissimulation et une telle dextérité qu’involontairement nous regardâmes autour de nos jambes. A peine étions-nous descendus de notre observatoire qu’un autre taureau affolé bondit, par une des portes de la ville qui se referma immédiatement sur lui, dans l’espèce d’arène où nous étions enfermés entre la mer et le mur. C’était une surprise que nous avaient ménagée ces aimables insulaires. Le taureau se précipita tête baissée, sur notre groupe, bouscula trois ou quatre indigènes qui n’eurent pas le temps de se détourner, m’effleura en passant comme une flèche et tomba à la mer, emportant un Grand Comorien entre ses cornes. Nous croyions le Comorien perdu quand nous le vîmes reparaître, nager vigoureusement vers le taureau et, après une courte lutte, le noyer en lui maintenant la tête sous l’eau. On retira le pauvre animal sans mouvement ; quant au Comorien, il avait eu la chance de se trouver placé juste entre les cornes et il fut quitté pour quelques contusions. La Grande Comore ne produit pas assez de riz pour sa consommation ; le surplus est tiré de Madagascar. La principale richesse de l’île consiste dans l’élève et l’exportation du bétail qui se vend à la côte d’Afrique et dans les autres Comores. Bien que les cocos soient très abondants, on ne les exporte pas, car ils servent de boisson pendant la saison sèche ; on en fait aussi de l’huile à éclairer et de la graisse pour la cuisine un