Page:Gilbert - Mon apologie, 1778.djvu/18

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Qui parlant par mes vers, du goût humbles soutiens,
Couvrent de leurs talens l’impuissance des miens ;
Aux regards du public que ma voix désabuse
De leur antiquité semblent vieillir ma muse,
Et devant mes écrits, de leur nom appuïiés,
Font taire soixante ans de succès mandiés.
Peut-être ma jeunesse, objet de vos injures,
Donne encor plus de poids à mes justes censures :
On connoit ces vieillards, sur le Pinde honorés :
Politiques adroits, charlatans illustrés,
Ceux-ci, pour assûrer leur gloire viagère,
Dévouant au faux goût leur Apollon vulgaire,
De la Philosophie arborent les drapeaux :
Ceux-là, pour ménager leur illustre repos,
Flattant tous les partis de caresses égales,
Ont juré de mentir aux deux ligues rivales,
Et tous par intérêt taisant la vérité,
Vendent le bien public à leur célébrité.
Le jeune homme, ignoré des partis qu’il ignore,
De leurs préventions n’est point esclave encore.
Rempli des morts fameux, ses premiers précepteurs,
C’est par leurs yeux qu’il voit, qu’il juge les Auteurs ;
Son goût est aussi vrai, que sa franchise est pure ;
Comme il sort de ses mains, il sent mieux la nature ;
Son libre jugement est désinteressé
Et son vers dit toujours tout ce qu’il a pensé.