Page:Glatigny - Le Fer rouge, 1870.djvu/62

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toute la hauteur
De leur chaise-percée, ont l’amour-propre encore
D’être furieux si le peuple les ignore,
Et tout en se tenant prudemment à l’abri,
Ils aimeraient à voir l’horizon assombri
Les menacer, de loin, d’un tout petit nuage
Modestement chargé de foudres de louage ;
Cela les poserait auprès de leur portier ;
« Oh ! Pauvres gens ! » diraient les bonnes du quartier.
Non, le silence froid et digne des commères
Doit faire évanouir ces frivoles chimères.
On ne les plaindra pas ces sacs à millions,
Ajaxs en qui Daumier voit des tabellions
De village, échappés vivants des funambules,
Proscrits dont la patrie était les vestibules
De la chambre à coucher du héros de Sedan ;
Ils doivent tous aller où les neiges d’antan,
Où les pantins vidés, l’eau sale des cuisines !

Mais pourtant, ô Jersey ! Si poussant des racines
Dans ton sol généreux, ces hideux champignons
Osent parler d’honneur et font les compagnons,
Conduis-les brusquement devant le cimetière
Où ceux qui n’ont jamais courbé leur tête altière
Sont morts pour la justice et pour le droit sacré ;
Entr’ouvre un seul instant le tombeau vénéré,
Et poussant de la main ces ombres solennelles,
Confronte-les avec tous ces polichinelles !


10 octobre