Page:Goncourt - Journal, t7, 1894.djvu/152

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Cette conversation avec du Boisgobey me rappelle la conversation d’un créole de mes amis, sur le même sujet.

Lui, n’aurait pas été heureux en Orient ! car il trouvait une singulière et originale beauté au visage de toute femme qui jouit, même au visage de la dernière gadoue : beauté faite de je ne sais quoi qui vient à ses yeux, de raffinement que prennent les lignes de sa figure, de l’angélique qui y monte, du caractère presque sacré que revêt le visage des mourants, s’y voyant soudain, sous l’apparence de la petite mort.

Et cet ami me confiait que dans ces accès de pure bestialité d’autrefois, il était tout à coup irrité, oui, irrité contre cette spiritualité, cette divinité transfigurant le visage d’une sale bougresse, et qui lui donnait la tentation de l’aimer autrement que physiquement.

Samedi 11 septembre. — Dans l’Éducation sentimentale, une merveilleuse scène que la visite de Mme Arnoux à Frédéric, — et la sublime scène que ce serait, si au lieu des phrases très joliment faites, mais des phrases de livres, comme celle-ci : « Mon cœur, comme de la poussière, se soulevait derrière vos pas ! » c’était tout le temps de la langue parlée, de la véritable langue de l’amour.

Toutefois, il faut l’avouer, il y a une délicatesse