Page:Goncourt - Journal, t8, 1895.djvu/244

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bourgeoise, aux femmes, les coudes ramassés contre le corps… et la comtesse me fait joliment la caricature du geste non naturel et contraint, avec lequel les femmes croient faire de la dignité, disant que lorsqu’elle voit faire ce geste à une femme, elle sait d’avance ce qu’elle pense, ce qu’elle va dire.

Tout cela est dit, avec une parole légère sans appuiement, des mouvements d’un dessin élégant, et dans la pose et l’attitude doucement dédaigneuse, qu’elle me donne à peindre.

Puis la comtesse, prenant une lampe à la main, me fait voir les tapisseries de Boucher de la salle à manger, le portrait de Mme de Champcenetz peint par Greuze, un groupe d’Amours en marbre provenant du château de Ménars, qu’a possédé son beau-père, — et qui aurait échangé le mobilier de la chambre de Mme de Pompadour contre un mobilier d’acajou.

Je prenais congé de la gracieuse femme, au moment où elle me disait qu’elle me porterait un jour un volume d’histoires, racontées par sa petite fille à l’âge de cinq ans, pendant qu’elle était à sa toilette : histoires d’un caractère très original, inventées par l’enfant, au moment où elle ne savait ni lire ni écrire et qu’elle a fait copier dans un volume par un homme de ce temps, qui a l’écriture de Jarry.

Lundi 27 avril. — J’ai reçu, ce mois, un envoi touchant : j’ai reçu dans une grande enveloppe des