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philoſophie, je ſuis chargée de joindre à ce plan celui de former une Garde Nationale de femmes pour la ſurveillance de la Reine, de Madame Royale, de Madame, de Madame Eliſabeth ; on entend bien qu’elles ne prétendent pas à monter la garde dans les dehors, mais dans l’intérieur des appartemens, & d’accompagner par-tout. Ne craignez pas, Meſſieurs, que les femmes auxquelles vous accorderez cette marque d’eſtime, de confiance, qui eſt digne des Légiſlateurs éclairés qui compoſent l’auguſte Sénat François, en abuſent jamais ; nous vous répondrons ſur nos têtes, que la Reine ne diſparoîtra plus, ne formera aucuns complots, ſans qu’à l’initiant ils ne ſoient découverts : tout mon ſexe vous en eſt garant ; mais ce qui fera plus encore, c’eſt qu’elle sera respectée & traitée en Souveraine. Nous bornerons uniquement notre vengeance à chercher tous les moyens de la diſtraire & la contraindre à reſpecter, à chérir & admirer le nom François.

Les circonſtances autoriſent tous les Citoyens, de quelque état, de quelqu’âge, de quelque ſexe qu’ils ſoient, à voler au ſecours de la Patrie.

Les femmes ont contribué peut-être le plus à la Révolution qui nous aſſure une Conſtitution qui va régénérer le Royaume, & aſſurer le bonheur de tous les individus : ſeroit-il donc ſi déplacé qu’elles contribuaſſent encore à raſſurer la France ſur les événenemens futurs ? Tout eſt poſſible dans ce ſiècle de lumières & de philoſophie.

Le temps ne me permet pas, Meſſieurs, de développer une foule d’idées que j’aurois à ſoumettre à votre ſageſſe, ſur la capacité, ſur la force & le courage de tout mon ſexe que je repréſente.

Au nom de ce ſexe ſenſible, jadis frivole, aujourd’hui eſſentiel, je vous demande, Meſſieurs, qu’il ſoit autoriſé à marquer dans la Révolution ; que vos femmes, vos ſœurs, vos filles ſoient fières un jour de porter le glorieux nom de Françoiſes, & que ces Amazones modernes réaliſent, à cette épo-