Page:Gourmont - Le IIme Livre des masques, 1898.djvu/198

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est vraiment riche d’images et d’idées, il les rassemble toutes, avec la fièvre du botteleur que presse l’orage, et il nous les jette tout odorantes encore de la terre dont elles sont nées ; il s’agit du livre III du Vœu de Vivre, tableau tourmenté d’une nature ivre et en sueur :


Oh ! la Terre
la Terre ! en les sueurs et le hâle :
et l’odeur, l’aiguë odeur d’engrais
vit, et de terre grasse et de glu de marais
qu’emporte dans son poil la taure allant au mâle
giglant lié aux portes sourdes, tout vermeil…


C’est de la peinture à pleine pâte, jetée fougueusement, aplatie au couteau sur la toile comme sur une palette. La mort de la vieille paysanne, qui agonise pendant que ronfle la machine à battre, est une belle page : et avec quelle simplicité grave est dite la vie de la mère de toute la maison :


Vous Autres ! elle a été la Femme-Forte
qui sur le seuil assise sut garder la porte
de tout malheur et de tout étranger : elle a
été autant que tous les hommes que voilà,
vaillante à l’œuvre de la terre : elle a
été, autant que toutes Femmes que voilà,