Page:Gustave Flaubert - Œuvres de jeunesse, I.djvu/36

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— Ce n’est point un trône à t’annoncer, un trône dont tout à l’heure tu élevais déjà la gloire ; écoute, demain, tu dois mourir.

— Terreur d’enfant !

— Oui, tu dois mourir, te dis-je. Non, ce n’est pas une terreur d’enfant, ce ne sont pas des paroles de pauvre femme ; le duc d’Alençon m’a dit que demain…

— Ensuite ?

— Que demain il ne resterait du duc de Guise qu’un cadavre mutilé.

— Comment ?

— Il m’a dit que son frère allait proposer au conseil de t’assassiner demain.

— Lui ? assassiner quelqu’un ? il n’oserait !

— Oh ! de grâce ! quitte Blois !

— Non ! plutôt quitter la vie !

— Oh ! mais tu es bien cruel. Oui, oui, je t’en prie, fuis loin d’ici, repousse-moi, méprise-moi, mais par grâce, fuis !

— Ce ne serait jamais qu’avec toi, avec mon royaume et ma couronne.

— Tu plaisantes, ô mon Dieu !

— Et toi, tu as peur.

— Oui, je tremble, je tremble de crainte pour toi ; mais toi, demain, tu trembleras du frisson de la mort.

— Soit ! mais, Charlotte, un baiser avant la tombe, et je dormirai tranquille.

Et la nuit se passa en caresses et en joyeuses amours.

III

le conseil du roi.

Pendant que le duc de Guise discutait avec ses amis sur le moyen de s’emparer du trône d’Henri III, celui-ci discutait avec les siens sur celui qui serait propre à le conserver. Catherine l’avait prévu ; l’assas-