Page:Gustave Flaubert - Œuvres de jeunesse, I.djvu/93

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rite ; elle était au même degré que cette masse de chair qui se contournait avec force, qui marchait la tête renversée au même niveau que les pieds, ne laissant apercevoir, sous sa longue robe bleue, qu’un ventre à la place d’une tête et que des seins qui tombaient avec dégoût et pesanteur.

Oui lorsqu’elle se relevait, son visage était couleur de pourpre, ses yeux tout violets et pleins de sang, et ses veines gonflées.

Et sur tout cet ensemble grotesque, il y avait pourtant répandu un certain air de courtisanerie, de flatterie ; sa bouche sans dents voulait sourire, elle faisait une grimace ; son regard ennuie et pèse, mais elle déplaît souverainement lorsqu’elle dit d’une voix aigre et d’un ton de pie-grièche : « Et regardez bien, messieurs, comme ceci est difficile ! ».

Et la musique continuait, Isabellada dansait, sautait, tourbillonnait comme des pensées d’amour dans le cœur d’un poète.

De temps en temps quelque chose se faisait entendre dans un plat qui était sur le tapis.

Y a gras, dit Isambart en défaisant sa perruque.

VII

Vous ne savez peut-être pas ce que sont les quatre masques qui s’avancent, crochés tous ensemble, dans la rue du théâtre.

Il y a un pierrot avec une tête de bœuf ; c’est un homme petit, large, de bonne humeur, et qui promet de s’en donner une bosse, c’est son expression. À sa gauche est un domino noir, qui marche bien mal, la tête baissée ; ce domino a l’air d’une femme. Puis c’est un Diavolo, assez bien fait, qui parle tout bas à une jolie Suissesse au cotillon court et qui porte fièrement une tête sans masque.