Page:Gustave Flaubert - La Tentation de Saint-Antoine.djvu/76

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truosité flottant autour de lui, l’effroi d’un crime près de s’accomplir.
Mais
l’inspiré
frappant du talon, claquant des doigts, hochant la tête, psalmodie sur un rythme furieux, au son des cymbales et d’une flûte aiguë :

Viens ! viens ! viens ! sors de ta caverne !

Véloce qui cours sans pieds, capteur qui prends sans mains !

Sinueux comme les fleuves, orbiculaire comme le soleil, noir avec des taches d’or comme le firmament semé d’étoiles ! Pareil aux enroulements de la vigne et aux circonvolutions des entrailles !

Inengendré ! mangeur de terre ! toujours jeune ! perspicace ! honoré à Épidaure ! Bon pour les hommes ! Qui as guéri le roi Ptolémée, les soldats de Moïse, et Glaucus fils de Minos !

Viens ! viens ! viens ! sors de ta caverne !

tous
répètent :

Viens ! viens ! viens ! sors de ta caverne !

Cependant, rien ne se montre.

Pourquoi ? qu’a-t-il ?

Et on se concerte, on propose des moyens.
Un vieillard offre une motte de gazon. Alors un soulèvement se fait dans la corbeille. La verdure s’agite, des fleurs tombent, — et la tête d’un python paraît.
Il passe lentement sur le bord du pain, comme un cercle qui tournerait autour d’un disque immobile, puis se développe, s’allonge ; il est énorme et d’un poids considérable. Pour empêcher qu’il ne frôle la terre, les hommes le tiennent contre leur poitrine, les femmes sur