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LE RISQUE MÉTAPHYSIQUE DANS LA SPÉCULATION.

une « philosophie de l’espérance[1]. » Un enfant vit un papillon bleu posé sur un brin d’herbe ; le papillon était engourdi par le vent du nord. L’enfant cueillit le brin d’herbe, et la fleur vivante qui était au bout, toujours engourdie, ne s’en détacha pas. Il s’en revint, tenant à la main sa trouvaille. Un rayon de soleil vint à briller ; il frappa l’aile du papillon, et soudain, ranimée et légère, la fleur vivante s’envola dans la lumière. Nous tous, chercheurs et travailleurs, nous sommes comme le papillon : notre force n’est faite que d’un rayon de lumière ; — pas même : de l’espoir d’un rayon. Il faut donc savoir espérer : l’espoir est la force qui nous porte en haut et en avant. — Mais c’est une illusion ! — Qu’en savez-vous ? Faut-il ne pas faire un pas, dans la crainte qu’un jour la terre ne se dérobe sous nos pieds ? Ce n’est pas tout que de regarder bien loin dans l’avenir ou dans le passé, il faut regarder en soi-même, il faut y voir les forces vives qui demandent à se dépenser, et il faut agir.


II

LE RISQUE MÉTAPHYSIQUE DANS L’ACTION


« Au commencement était l’action, » dit Faust. Nous la retrouvons aussi à la fin. Si nos actions sont conformes à nos pensées, on peut dire aussi que nos censées correspondent exactement à l’expansion de notre activité. Les systèmes métaphysiques les plus abstraits ne sont eux-

  1. Voir M. Fouillée, la Science sociale contemporaine, liv. V.