l’inflige. Quant à la peine du sens, que les théologiens en
distinguent, elle est évidemment bien plus insoutenable
encore, même si on la prend en un sens métaphorique. Au
lieu de damner, Dieu ne peut qu’appeler éternellement
à lui ceux qui s’en sont écartés ; c’est surtout pour les
coupables qu’il faudrait dire avec Michel-Ange que Dieu ouvre
tout grands ses deux bras sur la croix symbolique. Nous
nous le représentons comme regardant tout de trop
haut pour qu’à ses yeux les réprouvés soient jamais autre
chose que des malheureux ; or les malheureux ne
doivent-ils pas être, en tant que tels, sinon sous les autres rapports,
les préférés de la bonté infinie ?
II
SANCTION D’AMOUR ET DE FRATERNITÉ
Jusqu’ici, nous avons considéré comme liés les deux aspects de la sanction : châtiment et récompense ; mais peut-être est-il possible de les considérer à part l’un de l’autre. Certains philosophes, par exemple, semblent disposés à rejeter la récompense proprement dite et le droit à la récompense, pour n’admettre comme légitime que le châtiment[1].
- ↑ « Nous admettons sans hésiter la maxime stoïcienne : La vertu est à elle-même sa propre récompense... Concevrait-on un triangle géométrique qui, par hypothèse, serait doué de conscience et de liberté, et qui, ayant réussi à dégager sa pure essence du conflit des causes matérielles qui tendent de toutes parts à violenter sa nature, aurait en outre besoin de recevoir des choses extérieures un prix pour s’être affranchi de leur empire ? » (M. P. Janet, La morale, 590.)