Page:Hardy - Deux yeux bleus, trad. Paul-Margueritte, 1913.djvu/9

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véhémentes au sujet d’une certaine lettre, et des mots qui ressemblaient fort à des jurons.

— Papa, dit-elle à une de ces occasions au bel homme d’une quarantaine d’années, au teint rouge, qui soufflait et sifflait comme une bouteille de vin mousseux, — papa, — et elle haussait la voix, car le pasteur avait l’oreille un peu dure, — ne descendrez-vous pas dîner ce soir ?

— Peur que non ; heu ! heu ! bien peur que non, Elfride ; ffh ! ffh ! ffh ! Je ne peux seulement pas supporter un mouchoir sur ce satané orteil ; encore moins une chaussette ou une pantoufle. Ffh ! ffh ! Allons! Voilà que ça recommence ! Non je ne me lèverai pas avant demain matin.

— Alors, j’espère que ce monsieur de Londres ne viendra pas. Car je ne saurais que faire, papa.

— Ce serait certainement fort ennuyeux.

— Je doute qu’il vienne aujourd’hui.

— Pourquoi ?

— A cause du vent.

— Du vent ? Quelle drôle d’idée, Elfride ! Depuis quand le vent empêche-t-il un homme de faire son travail ? Aussi, pourquoi, diable, ai-je eu cette attaque de goutte !... S’il vient, envoyez-le moi de suite, puis donnez-lui à manger et montrez-lui son lit. Bon Dieu ! Quel ennui !

— Faut-il lui préparer un dîner ?

— Trop lourd, après la fatigue d’un long voyage.

— Du thé ?

— Pas assez substantiel.

— Un souper alors ? Il y a du faisan froid, du pâté de lièvre et des pâtisseries.

— Oui, un souper.

— Dois-je lui servir son thé, papa ?

— Bien sûr. N’êtes-vous pas maîtresse de maison?

— Quoi, m’asseoir en face de cet étranger ! Et personne pour nous présenter !

— Sottise, enfant ! Vous êtes plus intelligente que