Page:Hervilly - Le Harem, 1874.djvu/19

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


Pour vos maigres tailleurs, j’ai gardé peu d’estime :
La peau d’un buffle noir enveloppe mes reins,
Et sur son cuir tanné j’inscris chaque victime
De ma zagaie, où flotte une touffe de crins !

Notre couple effrayant en tous lieux a la vogue ;
On le cite à la danse, au festin, au combat ;
Nul ne sait mieux que nous conduire une pirogue
Sur les flots encombrés de nasses du Saubat.

Ma négresse est mon dieu ! je l’avoue à voix basse ;
Et, quand j’ai vendu deux défenses d’éléphant,
Je lui verse du rhum à pleine calebasse,
Et pendant qu’elle boit, je porte son enfant.

Alors, je suis heureux ! Je hurle en vrai sauvage !
Mes trois colliers de dents rendent un son hideux !
Je bondis ! et mon cœur ne voit plus le rivage
Où vit, en m’oubliant, une femme aux yeux bleus.