Page:Hoffmann - Contes posthumes, 1856, trad. Champfleury.djvu/223

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

qui devait maintenant lui servir de cercueil. Cette boîte a été attachée à une grosse pierre et jetée à la mer par moi-même au son de trois coups de canon. La reine Kahumanu entonna en même temps un chant auquel tous les O-Wahutois s’unirent, qui était aussi lugubre et terrible que l’exigeait la solennité. Ensuite on tira de nouveau trois coups de canon et on distribua de la viande et du rhum à l’équipage ; des grogs et d’autres rafraîchissements furent servis au roi Téimotu, à Kahumanu, ainsi qu’aux autres O-Wahutois. La bonne reine est inconsolable de la mort de son cher Menzies. Pour honorer la mémoire de cet homme tant aimé, elle s’est plantée dans la fesse une grande dent de requin et souffre encore horriblement de cette blessure. Il me reste à mentionner que Davis, le fidèle gardien de Haimatochare, a prononcé un discours très-touchant dans lequel, après avoir décrit brièvement la vie de Haimatochare, il a démontré la fragilité des choses terrestres. Les matelots les plus durs ne purent retenir leurs larmes, et comme Davis poussait d’énormes sanglots pour impressionner davantage ses auditeurs, il arriva à faire hurler effroyablement tous les O-Wahutois, ce qui ne rehaussa pas médiocrement cette imposante solennité.

Agréez, etc…

le capitaine Bligh.