Page:Hoffmann - Contes posthumes, 1856, trad. Champfleury.djvu/294

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toujours tirés comme ceux d’un orgue, ce qui fait que la maison du secrétaire intime ressemble à une tabatière à musique, dans laquelle un mécanisme remonté joue sempiternellement une symphonie insensée, composée par le diable en personne. — Presque tous les quatre jours de marché elle est accompagnée d’une autre servante. Sapienti sat ![1] — Tiens, vois-tu là, ce groupe qui se forme ? Ne serait-il pas digne d’être éternisé par le crayon d’un Hogarth ? Regarde donc, là-bas, sous la troisième porte du théâtre ?

MOI. — Deux vieilles femmes assises sur de petites chaises basses ; — toute leur marchandise étendue devant elles dans une moyenne corbeille. — L’une vend des mouchoirs, à attraper les myopes. — L’autre a un magasin de bas bleus et gris, de tricots, etc. — Elles viennent de se pencher l’une vers l’autre ; elles se chuchotent à l’oreille. — L’une savoure une tasse de café. — L’autre semble si absorbée par la conversation, qu’on dirait qu’elle en oublie le petit verre de schnaps qu’elle était sur le point de laisser glisser dans son gosier. — En effet, ce sont des physionomies frappantes ! Quel sourire de sorcières ! Quelles gesticulations avec leurs bras osseux et secs !

LE COUSIN. — Ces deux femmes sont continuellement ensemble, et malgré la différence de leur commerce pas de collision, par conséquent pas de jalousie de métier. Cependant, jusqu’à ce jour, elles se sont toujours guettées d’un œil hostile, et si mon expérience physionomique ne me trompe pas, elles doivent s’être jeté à la tête plus

  1. Assez de science : c’est-à-dire tu en sais assez.