Page:Hoffmann - Contes posthumes, 1856, trad. Champfleury.djvu/295

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d’une expression railleuse. Oh ! tiens ! tiens ! regai donc cousin, les voilà qui deviennent de plus en plus intime de cœur et d’âme. La marchande de mouchoirs partage un demi-tasse avec la marchande de bas. Qu’est-ce que cela veut dire ? Ah ! je sais. Il y a quelques minutes, une jeune fille de seize ans au plus, belle comme le jour, dont la mise indiquait les mœurs et la timide pauvreté, est venu près de la corbeille, attirée par les attrapes. Son attention était captivée par un mouchoir blanc, avec une bordure de couleur, dont elle avait peut-être grand besoin. Elle le marchanda, et la vieille déploya toutes les ressources de sa finesse mercantile, en déployant le mouchoir et en faisant briller au soleil ses couleurs éclatantes. Elles tombèrent d’accord, mais quand la pauvrette voulut tirer sa bourse du coin de son mouchoir de poche, elle ne trouva pas assez d’argent pour une pareille dépense. Les joues en feu et les yeux pleins de larmes, la pauvre jeune fille s’éloigna aussi vite qu’elle put, pendant que la vieille éclatait de rire méchamment, en repliant le mouchoir et en le rejetant dans la corbeille. Il a dû s’ensuivre de jolis propos. Mais voici maintenant que l’autre sorcière connaît la jeune fille et la triste histoire de sa famille ruinée qu’elle met sur le tapis, en y joignant une chronique scandaleuse pour le divertissement de la marchande abusée. Il y a certainement là-dessous quelqu’abominable calomnie, grosse comme le poing, qui aura été payée par cette tasse de café.

MOI. — De toutes les combinaisons que tu déroules là, cousin, il est possible qu’aucune ne soit vraie ; et cependant, en regardant ces femmes, il me semble, grâce à ton exposition animée, que tout cela est on ne peut plus plau-