Page:Homère - Les dix premiers livres de l’Iliade trad. Salel 1545.djvu/32

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Du grand meutrier Hector, qui deffera
Grand part des Grecs, on me deſirera.
Et toy, ſurpris d’aigre melancolie,
Recognoiſtras ta meſchance & folie,
D’avoir ainſi laſchement deſpriſé,
Cil qui devoit eſtre le plus priſé.
    Ces motz finis, il gecta par grand ire
Son Sceptre en terre, & apres ſe retire.
Puis va ſ’aſſeoir : Et de l’autre coſté
Agamemnon de courroux tranſporté,
Continua la faſcheuſe querelle :
Voulant avoir Briſeis la tres belle.
    Sur quoy Neſtor le doux & beau parleur,
Qui des haultz cieux avoit receu tel heur,
Que plus que miel, douce eſtoit la harangue,
Qui decouloit de ſa diſerte langue :
Ayant auſſi par divin advantage,
Deſja veſcu juſques au troiſieſme eage :
Se mit debout, & devant l’aſſiſtence,
Mit en avant ſon ſcavoir & ſa prudence.
    Ô quel malheur, Ô quelle perte expreſſe,
Ie voy tomber ſur le pays de Grece :
Ô quel plaiſir. Ô quel eſpoir auront
Priam, ſes filz, & ſubjectz, quand ſcauront
En noſtre camp, par colere enflammée,
Eſtre en debat les plus grands de l’armée.
Laiſſez, laiſſez ce diſcord & courroux,
Et me croyes, qui ſuis plus vieil que vous,
I’ay converſé ſouvent avec pluſieurs,
Plus grands de force, & de conſeil meilleurs
Que nul de vous, leſquelz m’ayans ouy,
À mon conſeil ont touſjours obey,