Page:Homère - Odyssée, traduction Leconte de Lisle, 1893.djvu/158

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et la demeure retentissait de leurs sanglots. Et la Déesse elle-même fut prise de pitié. Puis, la noble déesse, s’approchant de moi, me dit :

— Divin Laertiade, subtil Odysseus, va maintenant vers ta nef rapide et le rivage de la mer. Fais tirer, avant tout, ta nef sur le sable. Cachez ensuite vos richesses et vos armes dans une caverne, et revenez aussitôt, toi-même et tes chers compagnons.

Elle parla ainsi, et mon esprit généreux fut persuadé, et je me hâtai de retourner à ma nef rapide et au rivage de la mer, et je trouvai auprès de ma nef rapide mes chers compagnons gémissant misérablement et versant des larmes abondantes. De même que les génisses, retenues loin de la prairie, s’empressent autour des vaches qui, du pâturage, reviennent à l’étable après s’être rassasiées d’herbes, et vont toutes ensemble au-devant d’elles, sans que les enclos puissent les retenir, et mugissent sans relâche autour de leurs mères ; de même, quand mes compagnons me virent de leurs yeux, ils m’entourèrent en pleurant, et leur cœur fut aussi ému que s’ils avaient revu leur patrie et la ville de l’âpre Ithakè, où ils étaient nés et avaient été nourris. Et, en pleurant, ils me dirent ces paroles ailées :

— À ton retour, ô divin ! nous sommes aussi joyeux que si nous voyions Ithakè et la terre de la patrie. Mais dis-nous comment sont morts nos compagnons.

Ils parlaient ainsi, et je leur répondis par ces douces paroles :

— Avant tout, tirons la nef sur le rivage, et cachons dans une caverne nos richesses et toutes nos armes. Puis, suivez-moi tous à la hâte, afin de revoir, dans les demeures sacrées de Kirkè, vos compagnons mangeant et buvant et jouissant d’une abondante nourriture.

Je parlai ainsi, et ils obéirent promptement à mes pa-