Page:Homère - Odyssée, traduction Leconte de Lisle, 1893.djvu/218

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les beaux champs des hommes Aigyptiens, entraînant les femmes et les petits enfants et tuant les hommes. Et aussitôt le tumulte arriva jusqu'à la ville. Et les habitants, entendant ces clameurs, accoururent au lever d'Éôs, et toute la plaine se remplit de piétons et de cavaliers et de l'éclat de l'airain. Et le foudroyant Zeus mit mes compagnons en fuite, et aucun d'eux ne soutint l'attaque, et la mort les environna de toutes parts. Là, un grand nombre des nôtres fut tué par l'airain aigu, et les autres furent emmenés vivants pour être esclaves. Mais Zeus lui-même mit cette résolution dans mon esprit. Plût aux Dieux que j'eusse dû mourir en Aigyptiè et subir alors ma destinée, car d'autres malheurs m'attendaient. Ayant aussitôt retiré mon casque de ma tête et mon bouclier de mes épaules, et jeté ma lance, je courus aux chevaux du Roi, et j'embrassai ses genoux, et il eut pitié de moi, et il me sauva ; et, m'ayant fait monter dans son char, il m'emmena dans ses demeures. Certes, ses guerriers m'entouraient, voulant me tuer de leurs lances de frêne, car ils étaient très-irrités ; mais il m'arracha à eux, craignant la colère de Zeus hospitalier qui châtie surtout les mauvaises actions. Je restai là sept ans, et j'amassai beaucoup de richesses parmi les Aigyptiens, car tous me firent des présents. Mais vers la huitième année, arriva un homme de la Phoinikiè, plein de mensonges, et qui avait déjà causé beaucoup de maux aux hommes. Et il me persuada par ses mensonges d'aller en Phoinikiè, où étaient sa demeure et ses biens. Et je restai là une année entière auprès de lui. Et quand les jours et les mois se furent écoulés, et que, l'année étant accomplie, les saisons revinrent, il me fit monter sur une nef, sous prétexte d'aller avec lui conduire un chargement en Libyè, mais pour me vendre et retirer de moi un grand prix. Et je le suivis, le soupçonnant, mais contraint. Et la nef, poussée par le souffle propice de Boréas, approchait de la Krètè, quand