Page:Homère - Odyssée, traduction Leconte de Lisle, 1893.djvu/234

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Et le prudent Tèlémakhos lui répondit :

— Étranger, je te dirai la vérité. Ma famille est d’Ithakè et mon père est Odysseus, s’il vit encore ; mais déjà sans doute il a péri d’une mort lamentable. Je suis venu ici, avec mes compagnons et ma nef noire, pour m’informer de mon père depuis longtemps absent.

Et le divin Théoklyménos lui répondit :

— Moi, je fuis loin de ma patrie, ayant tué un homme. Ses frères et ses compagnons nombreux habitent Argos nourrice de chevaux et commandent aux Akhaiens. Je fuis leur vengeance et la Kèr noire, puisque ma destinée est d’errer parmi les hommes. Laisse-moi monter sur ta nef, puisque je viens en suppliant, de peur qu’ils me tuent, car je pense qu’ils me poursuivent.

Et le prudent Tèlémakhos lui répondit :

— Certes, je ne te chasserai point de ma nef égale. Suis-moi ; nous t’accueillerons avec amitié et de notre mieux.

Ayant ainsi parlé, il prit la lance d’airain de Théoklyménos et il la déposa sur le pont de la nef aux deux rangs d’avirons ; et il y monta lui-même, et il s’assit sur la poupe, et il y fit asseoir Théoklyménos auprès de lui. Et ses compagnons détachèrent le câble, et il leur ordonna d’appareiller, et ils se hâtèrent d’obéir. Ils dressèrent le mât de sapin sur le pont creux et ils le soutinrent avec des cordes, et ils déployèrent les blanches voiles tenues ouvertes à l’aide de courroies. Athènè aux yeux clairs leur envoya un vent propice qui soufflait avec force, et la nef courait rapidement sur l’eau salée de la mer. Hèlios tomba et tous les chemins devinrent sombres. Et la nef, poussée par un Vent propice de Zeus, dépassa Phéras et la divine Élis où commandent les Épéiens. Puis Tèlémakhos s’engagea entre les îles rocheuses, se demandant s’il éviterait la mort ou s’il serait fait captif.

Mais Odysseus et le divin porcher et les autres pâtres