Page:Homère - Odyssée, traduction Leconte de Lisle, 1893.djvu/395

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pieds vénérables ; et il y mit le feu, manifestant ses signes ; et l’éclat de la flamme enveloppa Krissè tout entière. Et les femmes des Krissagones et leurs filles aux belles ceintures hurlèrent au choc de Phoibos, et une grande terreur saisit chacune d’elles.

Puis, le Dieu, d’un bond, vola de nouveau, comme la pensée, sur la nef, semblable à un homme jeune et robuste, dans sa première puberté, avec une flottante chevelure sur ses larges épaules. Là, il leur dit ces paroles ailées :

— Ô Étrangers, qui êtes-vous ? D’où venez-vous sur les routes humides ? Naviguez-vous pour un négoce, ou à l’aventure, comme des pirates qui vagabondent sur la mer, exposant leur vie et portant les calamités aux autres hommes ? Pourquoi restez-vous stupides et ne descendez-vous point à terre, après avoir déposé les agrès de la nef noire ? Telle, en effet, est la coutume des hommes industrieux, quand, arrivés de la haute mer sur leur nef noire, ils touchent la terre, accablés de fatigue. Aussitôt le désir de la douce nourriture saisit leur esprit.

Il parla ainsi, et il inspira l’audace à leur âme, et le chef des Krètois lui répondit :

— Étranger car tu n’es point semblable aux mortels, ni par le corps, ni par la beauté, mais tu ressembles aux Dieux immortels, salut ! Réjouis-toi, et que les Dieux te rendent heureux ! Mais dis-moi la vérité, afin que je la sache. Quel est ton peuple ? Quelle est ta terre ? Quels hommes t’ont engendré ? Ayant d’autres pensées, nous naviguions sur les grandes eaux, vers Pylos, venant de la Krètè où nous nous glorifions d’être nés. Et maintenant nous sommes venus ici contre notre gré, avec notre nef, par d’autres routes et d’autres chemins, et désirant le retour. Mais un des Immortels nous a conduits ici contre notre gré.

Et l’Archer Apollôn, leur répondant, dit :