Page:Houssaye - Souvenirs de jeunesse, 1830-1850.djvu/160

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ses rêves les plus chers, tout le vin du pampre idéal qui fleurit dans le cœur, et la génération qui suit ne veut plus boire à ce tonneau-là. »

Vers 1844, nous avons, avec nos amis, tenté de faire l’histoire contemporaine des arts et des lettres par la poésie, par la critique, par l’imagination et par la gravure, créant ou interprétant la création d’autrui.

Nous avons débuté par cette idée, que Dieu ayant trouvé son œuvre imparfaite, après avoir créé le monde, en avait rêvé un plus beau, plus infini, plus digne d’un tel maître ; que l’artiste et le poète avaient reçu la mission de continuer le rêve de Dieu et de gravir l’âpre montagne où fleurit son idéal. Nous étions jeunes, nous marchions avec la passion du Beau, avec la haine des écoles et des entraves.

Le Beau, voici comment nous le comprenions : le Beau visible doit parler du Beau invisible comme le monde parle de Dieu. Dieu a créé l’homme avec un peu d’argile en laissant tomber sur sa créature les rayonnements